Je ne suis pas une fille sérieuse.

Parfois, tu me regardes comme si j’étais la fille la plus sérieuse de la terre, fiable, raisonnable, sage, imperturbable. Comme si j’avais un balai dans le cul.

Je ne suis pas comme ça. Tu le sais ?
Je suis de celles qui matent les fesses des hommes en rue.
De celles qui disent «oh, celui-là, j’en ferais bien mon quatre heures» et le pensent vraiment.

De celles qui ont envie de baiser le matin avant d’aller bosser.
De celles qui regardent leur mec au fond des yeux pendant qu’elles le sucent goulûment.
De celles qui se caressent sous la douche, et dans le bain aussi.
De celles qui offrent leur cul en cadeau, comme d’autres vont chercher les croissants, pour faire plaisir, et même parfois, quand c’est bien fait, en retirer un orgasme différent.

Et tu sais ? Je suis loin d’être la seule… Ta secrétaire, par exemple. Tu crois que tu la connais, que tu la devines, parce que sa vie semble aussi bien rangée que la mienne, avec des petites manies, un peu de shopping le samedi après-midi, et une sortie entre fille un vendredi par mois…

Parlons-en, tiens…
Tu sais de quoi on cause, entre filles ? On échange nos commentaires. Sur la taille de vos sexes, bien sûr… On en parle trente secondes, et le sujet est réglé.
Puis, on parle de désir, d’envie. On parle des règles tacites qu’on voudrait exploser, parfois. On parle de nos sexes, de leur sensibilité.
Parfois, il faut bien qu’on explique, qu’on détaille, et qu’on se montre les unes aux autres comment faire. Alors, on s’embrasse, on se caresse un sein, ou au creux des reins, on soupèse une fesse, on effleure une cuisse…


Cela n’a rien d’amoureux. C’est juste du désir.

Comme ce que je ressens pour toi, du désir.

Comme l’envie de mettre mon nez dans ton cou, ou de te mettre la main aux fesses, ou de te tailler une pipe dans ton bureau…
Quoi, ça ne se dit pas ? Arrête…
Ca ne se fait pas de coucher le premier soir, non plus.
Et ça ne se fait pas de coucher avec ses amis.
Et ça ne se fait pas de fantasmer tous les deux sur la même personne.
Et ça ne se fait pas de baiser la femme d’un pote.
Et ça ne se fait pas de mettre ta main dans ma culotte pendant que j’écris.
Et ça ne se fait pas de se retrouver à trois dans un lit.
Et ça ne se fait pas de jouir trois fois de suite, et de recommencer juste après, juste pour voir si toi tu peux encore bander.
Et ça ne se fait pas de passer sa vie à manger des carottes alors qu’on aime les haricots.
Si, c’est important, les carottes et les haricots. Parce que c’est ça au final qui te donnera l’impression d’être en accord avec toi ou pas.

Cette année se termine, et j’ai baisé, oh ça oui, avec envie et appétit. Toute l’année.
J’ai baisé avec des mecs qui me plaisaient à moitié.
Je les ai fait jouir dans ma bouche, sur mes seins, dans mon sexe, dans mes cheveux ou dans leurs mains.
Et chaque fois, dans les minutes qui ont suivi cette décharge des sens, je me suis demandée ce que je faisais là.
Et puis, il y a eu toi. Cette première fois comme un moment de grâce, la certitude d’être tous les deux dans la recherche du beau et du bon, de ce qui nourrit et de ce qui construit. Pourtant, nous ne faisions que cela, baiser… Mais avec une sincérité dans le geste rarement égalée.


Ta peau douce, tes mains agiles, m’ont laissée souvent sur ma faim, non pas de ne pas avoir eu de plaisir, mais bien d’en vouloir encore, comme des mots doux, des frissons de bonheur. Tous ces mois passés en rencontres de lit m’ont appris ce qu’il manquait à la technique… La fragile envie.



Pour ça, et pour avoir partager tes doutes, et ouvert ta braguette, comme d’autres ouvrent leur cœur, je voulais te dire… Merci. Et te souhaiter une bonne, très bonne, très très bonne année…
Mais je t’en prie, n’oublie jamais que la journée, quand je suis en tenue stricte de travail, que je négocie avec le sourire, certes, mais d’une poigne de fer, des budgets, des rapports, des réunions, des projets, quand j’aligne les mots les plus antipathiques du dictionnaire des activistes gauchistes, quand je fais des rapports au kilomètre comme d’autres baisent à la lime… Jamais, jamais tu ne dois oublier que sous ma jupe grise, il y a une petite culotte en soie, qui frémira sous tes doigts plus tard.

Et ça ne veut pas dire que je t’aime. Ca veut juste dire que j’aime jouir.

4 commentaires sur “4”

  1. "Et puis, il y a eu toi." J'adore ce "toi" qui nous différencie de l'animal et ce "toi" qui fait rebondir nos sentiments humains…

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